INTERVIEW AUTEUR
Christine MACHUREAU
Vendredi 3 mai 2019 à 18 h
(différé)
JM : - Bonsoir à tous
⁃ Je vous ai parlé sur ces pages de Christine MACHUREAU que je compte depuis plusieurs années parmi mes fidèles amies et dont j’ai lu pratiquement tous les romans. Christine a gentiment accepté, récemment, de se soumettre à mes questions.
⁃ Je partage donc avec vous cette interview, à l’issue de laquelle vous pourrez, si vous le souhaitez, poser des questions auxquelles Christine répondra en direct.
JM : - Bonsoir Christine
⁃ Comment vas-tu ? Es-tu prête à « subir mon petit interrogatoire » ?
Christine : J’ai rassemblé tout mon courage. Les épreuves nous forgent un moral d’acier !
JM : - Peux-tu, tout d’abord, te présenter afin que nos amis puissent mieux te connaître ?
Christine : Je suis un écrivain tardif… J’ai dû comme beaucoup travailler pour assurer le quotidien et me retrouver sur une île au milieu du Pacifique Sud a déclenché un phénomène incontrôlable : l’écriture.
L’Histoire a toujours été un cheval de bataille, un théâtre peuplé des plus beaux héros et d’héroïnes incontournables et je m’y suis intéressée vers l’âge de onze ans. Une imagination foisonnante a fait le reste, y avait plus qu’à !
JM : - Peux-tu nous parler de tes romans ?
Christine : Ils mettent souvent en scène des femmes, des hommes, au caractère bien trempé, se découpant sur un fond politique et historique marquant. Ainsi ma saga « Mémoire » met en scène le vécu des petites gens sous la guerre de Cent Ans. D’Or de sang et de soie, trace à grands traits la fin et l’héritage d’Attila. Il me faut un élément déclencheur pour accoucher d’un roman… Quelque chose de véridique, un détail qui m’apparait transcendant, mais qui n’a été utilisé par personne. Autrement dit, quelque chose qui est connu, mais dont personne ne s’est servi. Deux de mes romans sont un peu à part… L’ADN d’un Dieu et La Femme d’un Dieu. J’ai voulu par ces deux écrits remettre un peu de réalité dans le nouveaux testament…
JM : - As-tu d’autres projets d’écriture et peux-tu nous en dire quelques mots ?
Christine : J’ai toujours deux ou trois projets d’avance. Lorsqu’un roman est au deux-tiers fini, d’autres personnages commencent à frapper à la porte. Ils emplissent mes pensées et me créent carrément des tensions dont je ne me soulage qu’en mettant leur vie par écrit.
JM : - Que représente pour toi l’écriture ?
Christine : Une puissance, un pouvoir, un moyen qui bien souvent, pour ne pas dire tout le temps, rejoint peu ou prou l’actualité d’aujourd’hui… Ne dit-on pas que l’Histoire est un éternel recommencement ?
JM : - Tu as une imagination débordante et même parfois décoiffante ! Où trouves-tu l’inspiration pour créer les protagonistes de tes romans ?
Christine : Je pense que mes personnages me choisissent et non l’inverse. C’est peut-être bizarre, mais c’est ainsi. À partir du moment où j’ai ouvert la boite de Pandore, je ne contrôle plus rien. Les personnages se racontent, m’échappent.
JM : - La plupart de tes ouvrages sont des romans historiques. L’écriture de tels romans nécessite d’importantes recherches. Comment as-tu procédé pour ce faire ?
Christine : Je savais lire à l’âge de quatre ans et demi. Mon père, militaire de carrière, était un passionné d’Histoire et m’emmenait visiter des châteaux, des champs de bataille avec tout un tas de détails additionnels.
Exemple : les Champs Catalauniques, la route de Varennes, Jeanne d’Arc et Orléans et des récits fabuleux qui bien plus que les contes (que j’aimais aussi) ont peuplé mon imaginaire.
Ainsi lorsque j’ai commencé « Mémoire », j’étudiais la guerre de Cent Ans depuis… 50 ans. Je ne faisais que vérifier les dates. J’ai la chance d’avoir une excellente mémoire. Une expérience universitaire me permet, lorsque je dois faire des recherches, d’avoir la méthodologie efficace. La Bibliothèque nationale de France et son site Gallica me sont d’un grand secours.
JM : Comment écris-tu tes romans (carnets, cahiers, fiches, écriture directe sur l’ordinateur) ?
Christine : J’accumule d’abord la documentation qui peut être variée : ouvrages spécialisés, objets, reproduction, cartes. Mes personnages sont prêts (ce sont eux qui me le disent et je n’ai jamais eu le moindre doute à leur sujet !) J’écris une page de synopsis, une seule même si l’ouvrage fait 400 pages et ne la consulte plus jamais… J’ai quelques notes d’Histoire sur un grand cahier et des scènes difficiles sur un moleskine et j’empoigne enfin mon ordi, qui ne me résiste jamais !
JM : - Comment as-tu procédé pour faire publier tes livres ?
Christine : J’ai consulté des éditeurs. Mais mon éditrice actuelle, Anita Berchenko, les éditions du 38, avait repéré « Mémoire » bien avant d’être elle-même éditrice, même si elle en avait l’envie. Elle m’a contactée au tout début de ma carrière de romancière, j’étais alors sur mon île, à quinze mètres du lagon… Elle a été la première à croire en moi… et comme je suis fidèle…
JM : - As-tu des séances de dédicaces prévues prochainement et où ?
Christine : 21 Juillet à Monpazier (24) et dernier WE d’Aout à Lalinde. Je fais aussi des conférences qui semblent plaire.
JM : Es-tu sensible à la critique littéraire et penses-tu que les blogs, les réseaux sociaux aident les écrivains à promouvoir leurs écrits ?
Christine : On peut déglinguer mon écrit et mon mécontentement va durer… un quart d’heure ? On peut tourner, virer, mais ne pas s’arrêter face à une mauvaise critique. J’ai la chance que les mauvaises soient très rares. Je pense que dans ce monde où tout, absolument tout, même nos impôts ! passe par internet que réseaux sociaux et blogs sont le quotidien d’un écrivain s’il veut s’impliquer dans sa promo. Et je ne dois pas laisser l’éditrice tout assumer… qui d’autre que moi peut le mieux parler de mes romans ?
JM : - Que penses-tu de l’édition numérique ? (avantages – inconvénients)
Christine : Au risque d’en choquer beaucoup, je pense du bien du numérique. J’ai commencé par-là, et je ne vais pas cracher dans la soupe. Le numérique et la liseuse, c’est offrir à tous la chance de lire pour un coût raisonnable. C’est aussi épargner des arbres dont le sang va au pilon quand les éditeurs décident de supprimer les exemplaires invendus. Je suis obligée parfois de lire des ouvrages de documentation qui ont 600 pages et je vous assure que vis à vis du poids qu’ils représentent, c’est pénible… mais je conçois qu’un livre papier fasse vibrer ceux qui en ont l’habitude. Pas d’ostracisme. À aucun niveau.
JM : - Quels sont les auteurs qui t’ont donné l’envie d’écrire ?
Christine : Mes Maîtres ? sans conteste, en premier Victor Hugo. Avez-vous lu des poèmes de V.H. ? Si vous n’avez jamais fait cela, alors ne parlez pas de poésie.
Alexandra David Neel est mon héroïne. J’ai tout lu, tout ce qu’elle a écrit. J’ai même suivi ses traces. Est-ce pour cela que je me suis retrouvée en Himalaya ?
Puis les grands voyageurs… Jack London, Hemingway… et pour la dérision, Bukowski.
JM : Lis-tu ? Si oui quel genre ?
Christine : Écrire sans lire ? Cela existe-t-il ? Je suis toujours absorbée par de nouvelles découvertes et je lis plus de documents et de biographies évidemment que de romans. Mais je lis, je lis tout le temps et plusieurs livres à la fois.
JM : - A quelle époque aurais-tu aimé vivre ?
Christine : Je ne suis pas mécontente de vivre à l’époque où nous vivons. Les époques charnières sont passionnantes, et pas que la nôtre. La période du début de la Renaissance devait être fabuleuse à vivre. N’avez-vous pas remarqué que les nouveautés technologiques arrivent par bouffées, toutes en même temps ? Et qu’il en est de même pour les nouvelles idées ?
JM : - Je crois savoir que tu as beaucoup voyagé. Peux-tu nous en parler un peu afin de nous faire rêver ? Est-ce que ces voyages t’ont inspirée pour l’écriture de tes livres ?
Christine : Si je n’avais pas voyagé et beaucoup vécu, je n’aurais pas écrit. Pour écrire, il faut avoir quelque chose à raconter. Il en est ainsi de beaucoup d’écrivains qui ont quelques succès. Remarquez, les trois auteurs aux Editions du 38 en tête de liste ont pas mal roulé carrosse… ça compte. Exemple, outre les auteurs que j’ai déjà cités vous trouvez de nos jours Catherine Poulain. Il y en a d’autres….
J’ai beaucoup appris avec des peuples dits indigènes. La vision de l’humanité telle qu’elle est connue en Occident est réductrice. Je me rappelle une conversation au bord d’un ruisseau en Himalaya où je faisais ma toilette avec trois Ladakis (tibetaines), il était vers 7 h du mat. Une rosée gelée sur les herbes autour. Des gestes, des rires, de l’anglais… et mon mari sort de la tente. Les femmes le regardent et parlent entre elles. Je veux savoir. « Il est bien, tu le prêtes ou tu le vends ? » C’était il y a 25 ans, dans une petite vallée, à la frontière entre Inde et Tibet chinois. Voilà, ce sont des moments rares. Pour y revenir, elles ne plaisantaient qu’à moitié savez-vous ? Le matriarcat avait de ces réminiscences… J’ai vécu aussi au Moyen-Orient. Mon fils aîné est né à Beyrouth. Tunisie, Égypte, Turquie, Syrie. À propos quand je vois ce qu’il reste des plus beaux souks d’Alep, j’ai le cœur serré. Je suis restée silencieuse toute une journée devant les Bouddhas de Bamyan assassinés…. Une autre histoire, celle de Rimbaud…. À vingt ans, il avait tout dit, tout rimé avec sa lame d’écriture déjà mature… Il a tout dit. Il l’estime. Il arrête d’écrire. Plus rien à dire. Alors il choisit le voyage le plus aventureux, le plus dingue de l’époque. Et le métier le plus dangereux. Trafiquants d’armes dans l’Afrique profonde (Afrique noire, Corne, Aden et j’en passe, il allait là où son patron l’envoyait, de plus en plus loin, jusqu’en terres inexplorées.) Il revient malade, épuisé et meurt à Marseille. Je rêve encore à ce qu’il aurait pu écrire après de pareilles aventures.
Ma vie fut moins aventureuse mais… d’expatriation en expatriation, on survit, on engrange. Je suis rentrée en France, il y a huit ans, de retour d’Océanie.
Si vous voulez un aperçu de mes trajets parfois erratiques lisez : L’ADN d’un Dieu. (Alep-Shrinagar)
JM : En dehors de l’écriture quelles sont tes passions ?
Christine : Assouvir une passion ce n’est déjà pas mal. Et je vais toujours au bout de mes trajets. Alors mes passions n’ont pas été concomitantes, mais se sont succédé. Lecture, Histoire, Peintures, art textile et écriture.
JM : - Quel est ton proverbe favori ha
Christine : Non, je n’ai pas une tête à proverbes sans doute… mais une citation de Primo Lévi : « Il faut que je lui dise, que je lui parle du Moyen-Âge, de cet anachronisme si humain… de quelque chose de gigantesque que je viens d’entrevoir à l’instant même, en une fulgurante intuition et qui contient peut-être l’explication de notre destin, de notre présence ici aujourd’hui. » (Primo Levi. Se questo è un uomo. 1947)
Ce n’est pas une phrase à tiroirs, non, il s’agit d’inspiration, d’intuition, de réminiscences…
JM : - Si tu étais un fruit, une couleur, une fleur, un animal ? Tu serais :
Christine : Je suis tellement heureuse d’être une femme… que rien ne me vient, une fleur ? alors elle serait exotique à coup sûr !
JM : - As-tu quelque chose à ajouter ?
Christine : J’ai toujours tenté de repousser mes limites, une fois franchi la barrière invisible… les découvertes sont énormes et je ne sais si j’aurais tout le temps nécessaire mais qu’importe… je continue.
Et puis promo exige… En mai, juin et juillet vont paraître chez Pocket les trois premiers titres de « Mémoire », ce qui mettra à la portée de toutes les bourses mes romans papier au moindre coût possible. Je vous souhaite un bel été et je remercie Joelle de son invitation.
JM : - Merci Christine MACHUREAU pour ce très agréable moment passé en ta compagnie.
Les amis, vous avez la parole : vous pouvez si vous le souhaitez poser d’autres questions à Christine.
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